ABart Debie, ancien commissaire de police et conseiller de Filip Dewinter au sein du Vlaams Belang, affirme avoir été “une taupe” au sein du parti flamand d’extrême droite. Il aurait en effet fourni durant trois ans des informations sur le fonctionnement interne du parti à la Sûreté de l’État, a-t-il déclaré aux quotidiens De Standaard et Het Nieuwsblad. Filip Dewinter se dit trahi. La ministre de la Justice a rappelé à l’ordre la Sûreté quant à son devoir d’information à son égard.
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“J’ai été recruté comme informateur en 2007. Jusqu’à ma démission du parti en 2010, j’ai rencontré presque tous les mois une personne des services de renseignements”, a déclaré Bart Debie qui était à cette époque une figure-clé du Vlaams Belang.
Bart Debie aurait notamment fourni des informations concernant les soutiens financiers du Vlaams Belang.
Il a décidé de s’exprimer quant à son rôle d’informateur à la suite de déclarations de la ministre de la Justice, Annemie Turtelboom, qui a affirmé récemment que la Sûreté de l’État n’était pas impliquée dans l’espionnage de parlementaires.
Annemie Turtelboom rappelle la Sûreté de l’Etat à l’ordre
La ministre de la Justice, Annemie Turtelboom, a rappelé lundi, dans un communiqué de presse, avoir demandé récemment à la Sûreté de l’Etat de vérifier si l’obligation d’information à son égard était bien respectée dans les cas de surveillance de parlementaires.
Une circulaire de 2009 prévoit que le ministre de la Justice doit être immédiatement informé chaque fois que le nom d’un membre actif du parlement fédéral apparaît dans un rapport de la Sûreté. Début février, après plusieurs affaires de surveillance impliquant des politiciens, Mme Turtelboom a demandé au Comité R, chargé de superviser la Sûreté, de vérifier que cette instruction était bien suivie.
Dans un communiqué diffusé lundi, Mme Turtelboom a répété ses demandes.
“A la suite de la fuite de l’analyse de phénomène, la ministre de la Justice a demandé à la Sûreté de l’Etat si toutes les instructions concernant le fonctionnement de la Sûreté de l’Etat sont rigoureusement appliquées”, selon le communiqué.
“Vu l’importance d’une organisation de l’information correcte par les services de renseignements, (elle) a également demandé une enquête de contrôle au Comité R, qui est responsable légalement du contrôle parlementaire sur le fonctionnement de ces services”, est-il précisé.
“Annemie Turtelboom doit s’expliquer”
Colère de Filip Dewinter qui se dit “trahi par un bon ami”. Il fait remarquer qu’il avait aidé Bart Debie par le passé, lors de son procès, que le parti a payé ses amendes et qu’il a été salarié du Belang pendant des années.
L’ancien président du parti d’extrême-droite a également indiqué lundi attendre de la ministre de la Justice, Annemie Turtelboom, de “très sérieuses explications”. Cette dernière avait affirmé que la Sûreté de l’État ne pistait par les parlementaires.
“Soit elle ment, soit elle n’est pas au courant. Dans les deux cas, c’est problématique”, a-t-il dit.
Au-delà des moyens juridiques dont il envisage de faire usage, le sénateur VB entend placer le débat sur la scène politique. “Utiliser la Sûreté comme un service de renseignement politique, selon le régime en place, cela va beaucoup trop loin. Qui plus est, l’objectif, ici, était clairement de déstabiliser un parti ou un homme politique”, a-t-il souligné.
M. Dewinter exige de pouvoir examiner son dossier à la Sûreté. Il demande également que la Sûreté fasse étalage de ses méthodes et qu’on fasse savoir si d’autres taupes ont infiltré le Belang.
“S’il était informateur, ce serait un délit pour lui de le révéler”, rappelle le patron de la Sûreté
Alain Winants, le patron de la Sûreté de l’Etat, a confirmé lundi qu’il ne souhaitait donner aucune information sur l’éventuel rôle d’informateur qu’aurait joué l’ancien membre du Vlaams Belang Bart Debie. “Je ne peux pas vous parler de nos éventuelles sources, cela serait un délit”, a-t-il dit à Belga. “Mais si Debie était effectivement un informateur, cela serait un délit pour lui aussi” d’en parler, a-t-il ajouté.
Alain Winants a répété lundi que la Sûreté ne suivait aucun politicien pour ses activités parlementaires. “Mais nous sommes compétents pour enquêter sur un certain nombre de menaces, notamment l’extrémisme. La collecte de fonds à l’étranger pour la création de mouvements anti-Islam pourrait tomber sous cette catégorie”, a-t-il dit, sans pour autant confirmer les propos de M. Debie.
Certaines affirmations sont “totalement erronées ou fausses”
“Un certain nombre d’affirmations de monsieur Debie sont totalement erronées ou fausses”, a encore fait savoir la Sûreté de l’Etat dans un communiqué de presse diffusé lundi soir, en réaction à l’aveu par l’ancien membre du Vlaams Belang, Bart Debie, de sa collaboration avec l’agence de renseignements. Elle n’en dit toutefois pas davantage.
“Avant toute chose, nous souhaitons clairement indiquer que le service ne souhaite en aucun cas faire de déclaration concernant le fait que l’intéressé soit ou non un informateur de la Sûreté de l’Etat, étant donné que communiquer à ce sujet est un délit, aussi bien pour les membres du service que pour toute personne qui offre sa collaboration en application de la loi organique des services de renseignement et de sécurité du 30 novembre 1998”, rappelle la Sûreté.
Elle insiste par ailleurs “fermement sur le fait qu’elle ne suit pas, ne screene pas, ne file pas – etc – en tant que tels des partis politiques, des mandataires, des politiciens dans le cadre de l’exercice de leur mandat parlementaire et/ou ministériel”.
“Notons par ailleurs que monsieur Debie, pour peu que l’on croirait son récit, déclare que l’initiative de la prise de contact serait venue de lui-même. En outre, il faut également noter qu’un certain nombre d’affirmations de monsieur Debie sont totalement erronées ou fausses”, ajoute encore la Sûreté, sans préciser lesquelles.
Le Comité R va enquêter
Les “récentes révélations sur des informateurs éventuels dans le milieu politique seront reprises” dans l’enquête que mène actuellement le Comité R sur la manière dont les services de renseignement s’intéressent, le cas échéant, à des mandataires, a indiqué lundi le président de l’organe de contrôle, Guy Rapaille.
“Le Comité permanent R a reçu, ces derniers jours, tant du Sénat que du ministre de la Justice, des missions d’enquêtes relatives aux documents de la Sûreté de l’Etat qui, malgré leur caractère secret, ont été diffusés dans les médias. Il s’agit d’une part d’une note relative à l’infiltration de la communauté congolaise de Bruxelles par le mouvement de la Scientologie, et d’autre part d’un rapport concernant une analyse de phénomène sur des activités d’ingérence non étatiques. Le Comité permanent R a repris les diverses questions de ces autorités dans deux enquêtes de contrôle distinctes”, a-t-il indiqué dans un communiqué.
La première enquête, qui a déjà démarré, mais dont la portée est à présent étendue, traite de la manière dont les documents susmentionnés ont été “préparés et diffusés”, ainsi que de leur “conformité aux règles en vigueur”, a confirmé Guy Rapaille. “L’enquête sur les fuites en tant que telles est en premier lieu du ressort des autorités judiciaires, étant donné qu’il pourrait s’agir de délits”, a-t-il toutefois précisé.
Une seconde enquête, plus générale, traitera “la manière dont la Sûreté de l’Etat et le Service Général du Renseignement et de la Sécurité recueillent, le cas échéant, des informations sur des mandataires politiques, la manière dont ils conservent et utilisent ces informations et la manière dont ils en font rapport aux ministres de tutelle ou à d’autres autorités”, a ajouté M. Rapaille. “Il va de soi que de récentes révélations sur des informateurs éventuels dans le milieu politique seront reprises dans cette enquête”, a-t-il précisé.
Bart Debie et les méthodes musclées
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BELGIQUE | lundi 11 février 2013 à 4h37
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